Title: Thories et formes du secteur sans but lucratif
1Théories et formes du secteur sans but lucratif
- Deuxième séance Poitiers, le 5 octobre 2007
- Pr. Henry Noguès
2Théories et formes du secteur sans but lucratif
- Pourquoi existe-t-il un secteur sans but lucratif
? - Comment peut-on entreprendre autrement ?
Pr. H. NOGUES
3A- La norme néoclassique ne fait pas de place au
secteur non lucratif.B- Le secteur non lucratif
dispose datouts spécifiquesC- Les défaillances
du marché favorables au secteur non lucratif
1-Pourquoi existe-t-il unsecteur sans but
lucratif ?
4La norme néoclassique (1)
- Les marchés allouent correctement les
- ressources si les deux conditions
- suivantes sont satisfaites
- Une concurrence parfaite
- Des biens privés purs
5La concurrence parfaite
- Atomicité du marché des deux côtés
- Transparence sur les caractéristiques du produit
- Flexibilité des prix
- Homogénéité du produit
- Libre entrée et libre sortie
- Fluidité du marché
6Des biens privés purs
- Clause de rivalité la consomma-tion du bien par
un agent exclut les autres de cette consommation - Absence deffets externes La production ou la
consommation du bien ninfluence pas en dehors du
marché la situation des autres agents
7La norme néoclassique (2)
- Les marchés allouent correctement les
- ressources si les deux conditions suivantes
- sont satisfaites
- Une concurrence parfaite
- Des biens privés purs
- Dans cet univers, il ny a aucune raison dopérer
avec des organisations ayant un autre objectif
que le profit.
8La norme néoclassique (3)
- Le fait de vouloir aider un groupe en
- entreprenant pour vendre au dessous du
- prix du marché ou pour acheter au-
- dessus serait inefficient et représenterait
- gaspillage de ressources car un transfert
- monétaire forfaitaire et sans restriction y
- parviendrait mieux pour moins cher.
9La norme néoclassique (4)
- Conclusion A
- Dans un tel monde il ny a aucune place pour une
organisation sans but lucratif (OSBL-NPO) - Il faut une défaillance du marché pour
quapparaisse éventuellement un espace pour les
OSBL.
10La norme néoclassique (5)
- Conclusions A
- Les OSBL apparaissent si elles sont capables de
créer des conditions de transactions mutuellement
avantageu-ses que les OL ne peuvent réaliser. - Ce sont donc les atouts spécifiques des OSBL leur
donnant des avantages comparatifs quil faut
analyser.
11Les atouts spécifiques des OSBLselon Ben-Ner et
Gui.
- Trois atouts sont généralement mentionnés
- La contrainte de non-distribution du profit
- Le contrôle direct par les parties prenantes
- La coopération volontaire des membres
12La contrainte de non-distribution du profit
- Il sagit dune protection négative contre
certains comportements non désirables. - Mais cela ne constitue pas une incitation à des
comportements désirables aux yeux des parties
prenantes - Cela nexclut pas par exemple que les managers
fassent prévaloir leurs préférences et leurs
intérêts. - Cela nexclut pas non plus que les OSBL puisent
dégager des bénéfices. Cest son usage qui est en
question.
13Le contrôle direct par les parties prenantes
- Celui-ci nexiste que dans les OSBL mutuel-les et
non les "entrepreneuriales" ( selon la
classification de Ben-Ner Gui) - Mais lexercice de ce contrôle engendre des coûts
pour les parties prenantes dans la prise de
décision - Si ces coûts sont trop élevés, les organisa-tions
lucratives gardent toute leur place.
14La coopération volontaire des parties prenantes
- Le contrôle du management
- Le partage dinformations gt sélection pertinente
des membres - Auto-contrôle réciproque gt pression sociale
gt baisse coûts de transaction - Contribution volontaire en argent, en moyens
matériels ou en temps. - Révélation des demandes et des dispositions à
payer pour des biens publics offerts
(souscription, donation, tarifs libres, etc.)
15Les atouts spécifiques du secteur non lucratif
- Conclusion B
- Ces atouts et demandes révélées par des paiements
volontaires permettent à des OSBL datteindre des
équilibres financiers inaccessibles au OL - Des substituts aux OSBL peuvent aussi exister
(réputation, agences de surveillance, régulation
publique ou de la branche, éthique, etc.)
16Les défaillances du marché (1)
- Organisation mieux informée que le consommateur
- Pb choisir un fournisseur et lévaluer
- Outil OSBL CND contrôle
- Ex Soins aux pâ collecte de dépôts
17Les défaillances du marché (2)
- Organisation avec un pouvoir de marché
- Pb Inefficience, mauvais rapport qualité/prix
- Outil OSBL contrôle CND
- Ex Monopole gt commercialisation
- Monopsone gt employeur
18Les défaillances du marché (3)
- Rationnement, exclusion et discrimination
- Pb Parties prenantes exclues du marché du fait
notamment de la rigidité des prix - Outil OSBL CND contrôle
- Ex chômeurs, locataires discriminés
19Les défaillances du marché (4)
- Organisation moins informée que le consommateur
- Pb Sélection et surveillance des clients
- Outil OSBL sélection mutuelle et surveillance
- Ex Prêts, assurance dommage, emplois difficiles
à surveiller
20Les défaillances du marché (5)
- Bien public sans exclusion
- Pb Impact marginal, sélection fournisseur
- Outil OSBL CND et demande révélée par le
bénéficiaire - Ex Organisation environnementale volontaire,
aide aux nécessiteux
21Les défaillances du marché (6)
- Bien public avec exclusion
- Pb choix efficient (quantité, qualité,
variété), admission efficiente - Outil OSBL Contrôle sur le choix (qualité et
variété) et demande révélée par le bénéficiaire - Ex Education, arts dexécution
22Les défaillances du marché (7)
- Biens relationnels
- Pb Création efficiente des BR, appropriation
rente des actifs relationnels - Outil OSBL CDN et contribution des membres à
lenvironnement social - Ex Clubs, relations personnelles dans lemploi,
relation patient-soignant
23Les motivations de lengagement en économie
- Besoins matériels
- Besoins de sécurité
- Besoins non matériels
- Recherche de prestige et destime
- Sentiments altruistes
- Motivations relationnelles plaisir déchange
sentiments, idées, désir dattention, recherche
de relations durables, volonté dappartenance à
un groupe, etc
24Lévolution du secteur non lucratif Facteurs
défavorables (1)
- Facteurs réduisant la demande
- Accès amélioré à linfo des consommateurs
- Développement des régulations publiques et
conncurrentielles (labels) - Le progrès technique accroît le domaine de la
consommation avec exclusion - Augmentation de la différenciation des services
réduit non rivalité (TV)
25Lévolution du secteur non lucratif Facteurs
défavorables (2)
- Facteurs réduisant loffre
- Développement du commerce de la grande
distribution - Dissolution des réseaux de sociabilité, notamment
de voisinage du fait de la mobilité résidentielle
26Lévolution du secteur non lucratif Facteurs
favorables (3)
- Facteurs augmentant la demande
- Recul de lEtat providence et de loffre publique
(OSBL et OL) - ? différenciation (raciale, culturelle,
religieuse)gt? demande "club-goods - Progrès tk ? complexité des services
- Déplacement des demandes vers lintangible
complexe - gt intérêt de la co-construction O-D
27Lévolution du secteur non lucratif Facteurs
favorables (4)
- Facteurs augmentant loffre
- Besoin de sens et capacité dinitiative ? avec
richesse, revenu et éducation - ? nombre dagences daide à la création dOSBL
(et dOL) - ? fondations dédiées aux OSBL
- Diffusion et essaimage des expériences
- ? des dons des ménages et des entreprises
28Quest-ce quune entreprise normale ?
2- Comment peut-on "entreprendre autrement" ?
29Les logiques au cur de lentreprise capitaliste
i
Utilisation du service
30Lentreprise est guidée par la "main invisible"
dAdam Smith
- Une organisation instrumentale soumise à la
logique des intérêts économiques du capital
- Mais dont les effets pourraient être convertis
vers lintérêt général par un marché
concur-rentiel vraiment efficient.
31Lentreprise comme coalitiondacteurs différents
Consommateurs
Fournisseurs
Travailleurs
Daprès Cyert et March, 1964
32Les coopératives de travail
Travailleurs
Amélioration des conditions de travail et de
revenu
Daprès Guy Bernier, UQAM
33Chèque Déjeuner une coopérative ouvrière de
production
- créée en 1964 50 000 entreprises clientes
- 1 millions de salariés bénéficiaires
- Espagne, Italie, Hongrie, Tchéquie, Slovaquie,
Pologne, Roumanie, Bulgarie - 266 salariés
- 45 au titre de la participation, identique pour
tout salarié (8000 euros) - 10 rémunération des parts (max. 15600 euros)
- 45 de réserves impartageables
34La Contemporaine à Nantes Une imprimerie
coopérative
- 28 années dexpérience
- Part dassocié limitée à trois mois de salaire
- Un homme une voix
- Une présidente élue, rotation tous les trois ans
(Christine Noblet) - 23 collaborateurs touchant le même salaire de la
standardiste au Pdg !
35Un exemple de SCOP Moulin Roty
1972 Communauté de vie et activité artisanale à
5 fondateurs 1975 succès jouet auto gt travail
avec des CAT 1991 passage dune SCOP-SARL à une
SCOP-SA 2006 SCOP, 36 associés-salariés, une
filiale à Honk-Hong Échelle des salaires de 1 à 2
distribution égalitaire des profits
36Les coopératives de consommation
Consommateurs
Amélioration de laccessibilité et de la
qualité de loffre de biens ou services
Daprès Guy Bernier, UQAM
37Coopérative de producteurs
Fournisseurs
Amélioration du retour sur la production pour les
fournisseurs
Daprès Guy Bernier, UQAM
38La création de la Maif
En France, le groupe MAIF est le 5e assureur
automobile, le 8e assureur toutes assurances
dommages confondues. Fin 2005, le groupe MAIF
comptait 2,5 millions de sociétaires. 2,1
millions de contrats vie quotidienne et
habitation. 3,1 millions de véhicules assurés.
2,3 millions de contrats assurance de
personnes. Encaissements cumulés dans l'année
2,6 milliards d'euros Actifs gérés au titre de
l'assurance vie 4,5 milliards d'euros
- Trompés et grugés par les compagnies
d'assurance, vous pouvez vous libérer de leur
emprise. Essayez ! appel dun instituteur de
1931 - 1934
- Fondation
- En Vendée
39Les coopératives dinvestissement
Investisseurs
Amélioration du retour éthique sur investissement
Daprès Guy Bernier, UQAM
40Léconomie sociale et solidaire rend possible
dautres logiques
Amélioration de laccessibilité de loffre de
services
Amélioration des conditions de travail
Amélioration du retour sur linvestissement
Fournisseurs
Amélioration du retour sur la production pour les
fournisseurs
Daprès Guy Bernier, UQAM
41Allocations possibles des performances économiques
- Amélioration des conditions de travail
- Amélioration de laccessibilité et de la qualité
de loffre de service - Amélioration du retour sur la production des
fournisseurs - Amélioration du retour sur investissement
(qualitatif) - Finalités externes et non économiques
Daprès Guy Bernier, UQAM
42"La Scop, une alternative aux marchés qui
exigent une rentabilité à deux
chiffres" Isabelle Didier, administrateur
judiciaire
- BCS, une tannerie de Haute-Savoie, propriété du
groupe Jallatte se recentrant sur son cur de
mé-tier, la chaussure de haute sécurité, est
menacé. - Les fonds de pension propriétaires du groupe,
craignent des réactions à la fermeture. - La mandataire, convaincue de la viabilité
écono-mique de BCS, en dehors des critères
habituels des marchés financiers, propose la
solution Scop. - Transformée en coopérative avec lappui du réseau
Scop Entreprises, BCS affiche aujourdhui des
résultats conformes à ses prévisions.
43"Reprise en 1998, par des fonds de pension, la
ges-tion est devenue financière et notre filiale
BCS, une tannerie, nétait plus stratégique
René Liauzon
- Les avantages du système Scop
- il permet dassurer la pérennité dune entreprise
car il mise sur la priorité au savoir-faire des
salariés. - les salariés étant co-propriétaires, ils sont
bien plus impliqués dans le projet de
lentreprise. - Important pour BCS qui nintéresse pas les
investisseurs classiques dont les exi-gences de
rentabilité sont trop élevées.
44Les logiques spécifiques de lentreprise dESS
Daprès M. ADAM
Pr. H. NOGUES
LEN-CEBS - Université de Nantes
45Ouvrent à dautres principes daction potentiels
- Adhésion volontaire et ouverte
- Partage du pouvoir une personne, une voix
- Défense et mise en uvre des principes de
solidarité et de responsabilité - Primauté de la personne et de lobjet social sur
le capital - Autonomie de gestion et indépendance par rapport
aux pouvoirs publics - Lucrativité limitée orientée vers dautres
finalités.
Pr. H. NOGUES
LEN-CEBS - Université de Nantes
46Linstrumentalisation par le politique
- Une coproduction tronquée, avec un partenariat
seulement dexécution - La mutation des subventions en appels doffres
étroits réduisant laction à une simple
prestation de services - Le risque dune altération des projets
associatifs par les programmes publics. - Risque dun affadissement de lESS
47Le risque dune banalisation économique
- Pénétration de la culture marchande
- Les associations au contact des entre-prises gt
mise en concurrence - Processus renforcé par la construction du marché
unique lEurope ne connaît que des produits gt
réglementation inadaptée - Tentation de lisomorphisme institutionnel
48Les menaces sur léconomie sociale et solidaire
- Lenfer, cest les autres ! Sartre
- La méfiance du pouvoir politique
- La normalisation du marché.
- Qui ne sait pas vers quel port il doit tendre
na pas de vent qui lui soit favorable Sénèque - Le mimétisme institutionnel
- La menace technocratique.
Pr. H. NOGUES
LEN-CEBS - Université de Nantes
49Lenjeu identitaire entre organisation et
institution
- Les entreprises dESS ont deux types de
compor-tements possibles - comme une simple organisation instrumen-tale
visant des objectifs opérationnels, comme un
outil re-déployable (Selznick, 1957) - comme institution, porteuse de valeurs et capable
délaborer des stratégies de change-ment,
susceptibles de remodeler leur espace
dintervention. (D. North, 1990)
50Les risques dune identité dénaturée de lESS
- le cantonnement de lESS dans lassistance aux
pauvres - la dissociation du mouvement et de lorganisation
entreprenante - le glissement vers une société de marché
exclusive dautres valeurs.
51Les atouts de léconomie sociale et solidaire
- Proposer un projet cohérent pour vivre de façon
non contradictoire ses différents rôles
(consommateur, producteur, citoyen, épargnant,
etc.) gt La question du sens. - Développer des structures collectives com-me
autant de leviers de la transformation sociale gt
La question de laction. - Participer à la construction de la société en
personne libre et responsable - gt La question de la démocratie.
- Ce nest pas la révolution du monde mais son
- humanisation partout où cest possible D. Clerc
Pr. H. NOGUES
LEN-CEBS - Université de Nantes
52Le champ de léconomie sociale et solidaire
- Ce nest pas seulement une affaire de statut même
si le statut juridique peut constituer une
référence et un guide - Cest plutôt une question de pratiques et de
fonctionnement concret - Cest donc surtout le résultat dun exer-cice
collectif dune liberté conjuguant engagement
volontaire et esprit dinitiative et de
responsabilité.
53CONCLUSION
- Nous aurons demain autant besoin dentrepreneurs
de sens que nous avons eu besoin hier
dentrepreneurs économiques - Jean-Baptiste de Foucauld,
- Information Sociales n 90-91,
- p. 13. 2001.